Ouvrons nos cœurs et nos esprits à la vérité et à la réconciliation
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Phyllis Webstad a instauré la Journée du chandail orange. Elle parcourt le pays pour parler de son expérience dans les pensionnats et sensibiliser la population aux conséquences du système canadien des pensionnats autochtones. Elle a écrit quatre livres : « L’histoire du chandail orange », « Le chandail orange de Phyllis », « Avec nos cœurs orange » et « Derrière l’histoire du chandail orange ».
Le fils de Phyllis, Jeremy Boston, a ensuite créé l’Orange Jersey Project (projet de maillot orange). Les joueurs de hockey mineur du Canada sont invités à porter des maillots orange lors des entraînements et des événements afin de les encourager à s’informer sur l’histoire du système des pensionnats et à participer à la réconciliation entre les peuples autochtones et non autochtones.
La Journée du chandail orange et la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation auront lieu le 30 septembre.
Western a eu l’honneur de poser des questions à Phyllis et à Jeremy sur la Journée du chandail orange et la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation.
Question : En cette deuxième année de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, comment vous sentez-vous?
Phyllis : La première Journée du chandail orange a eu lieu le 30 septembre 2013. Pour moi, ce sera toujours d’abord la Journée du chandail orange, alors je dis maintenant que c’est la Journée du chandail orange, la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation.
La recommandation n° 80 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada stipule ce qui suit : « Nous demandons au gouvernement fédéral d’établir comme jour férié, en collaboration avec les peuples autochtones, une journée nationale de la vérité et de la réconciliation pour honorer les survivants, leurs familles et leurs communautés et s’assurer que la commémoration de l’histoire et des séquelles des pensionnats demeure un élément essentiel du processus de réconciliation ».
L’année dernière, nous avons tenu la première Journée nationale de la vérité et de la réconciliation. Je salue l’annonce du 27 mai 2021 des Tk'emlúps 215 sur la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation.
Je suis heureuse que cette journée soit maintenant fériée. À un moment donné de l’histoire, il n’y aura plus de survivants au Canada. Ma mère, mes tantes et mes oncles, ceux qui l’ont eu à la dure, ont plus de 70 ans, et j’en ai 55. Jeremy est dans la quarantaine. Bientôt, il n’y aura plus de survivants au Canada. Je suis donc heureuse que cette Journée nationale de la vérité et de la réconciliation permette de poursuivre le dialogue.
Jeremy a fréquenté le dernier pensionnat du Canada avant qu’il ne ferme ses portes en 1996, le Pensionnat indien de St. Michael à Duck Lake, en Saskatchewan. Quatre générations de notre famille ont fréquenté les pensionnats.
Q : Votre nouveau chandail orange vous a été confisqué lorsque vous êtes arrivée au pensionnat. Vos sentiments à l’égard de la couleur orange ont-ils changé? Ou la couleur orange vous rappelle-t-elle encore que vos sentiments n’avaient aucune importance et que personne ne se souciait de vous au pensionnat?
Phyllis : Certaines personnes pensent que c’est ma couleur préférée, mais ce n’est pas le cas. Je porte de l’orange uniquement pour le travail lié à la Journée du chandail orange. Vous ne me verrez jamais un samedi porter volontairement de l’orange pendant mon jour de congé.
J’ai appris à l’apprivoiser, et même à m’amuser avec elle. À une certaine époque, je ne pouvais même pas supporter d’être proche de cette couleur. Si je me trouvais dans un magasin où il y avait des articles orange, j’allais dans l’autre sens, ou je faisais quelques pas en arrière et je les contournais parce que cette couleur me rappelait de mauvais souvenirs. Mes sentiments ont changé, mais ce n’est toujours pas ma couleur préférée.
Q : Comment allez-vous commémorer le 30 septembre, Jeremy et vous? Que ferez-vous ce jour-là?
Phyllis : Jeremy et moi serons à Niagara Falls avec 19 membres de notre famille et de nos amis. Je n’ai jamais passé la Journée du chandail orange avec Jeremy ou mes petits-enfants, alors ce sera une première.
Le 30 septembre, des lumières orange éclaireront les chutes du Niagara pour rendre hommage aux enfants qui ont fréquenté les pensionnats autochtones du Canada.
Nous commencerons la journée par une cérémonie de l’aube, puis nous tiendrons une cérémonie officielle.
Des autochtones des côtés canadien et américain des chutes du Niagara joueront du tambour.
Jeremy : Je me sens fier et ému d’être avec ma mère ce jour-là pour la première fois.
Q : À votre avis, quelle incidence la Journée du chandail orange et la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation ont-elles sur les Canadiens?
Phyllis : Le symbole de la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation est le chandail orange, qui vient bien sûr de la Journée du chandail orange. Les Canadiens qui portent la couleur orange montrent leur soutien et encouragent le dialogue. Ce dernier est essentiel, car il a le pouvoir de changer les choses.
Q : Parlez-nous du Orange Jersey Project pour les jeunes hockeyeurs canadiens.
Jeremy : Dans le cadre de ce projet, nous fournissons des maillots orange aux équipes de hockey formées de joueurs de moins de 18 ans. Cette année, nous allons en remettre à 750 équipes partout au Canada. L’année dernière, 500 équipes ont reçu des maillots orange.
Nous espérons que les joueurs demanderont à leur entraîneur : « Pourquoi portons-nous de l’orange? ».
Nous fournirons aux entraîneurs et aux gestionnaires d’équipes des associations de hockey mineur notre cahier de programme ainsi que notre module d’apprentissage en ligne. Chaque équipe recevra un lien qui lui permettra de se rendre sur notre site Web et consulter les modules pour en apprendre davantage sur les pensionnats. Dans chaque module, il y aura un tableau de classement. Les joueurs participeront à un tirage pour gagner des prix.
Les équipes, les entraîneurs et les joueurs sont invités à porter leur maillot orange pendant les entraînements. Chaque maillot portera un code QR, que les gens pourront scanner pour obtenir la réponse à la question : « Où avez-vous eu ce maillot et de quoi est-il question? ».
Phyllis : Les joueurs peuvent les conserver et les porter dans leur communauté lors de dîners de famille ou d’autres activités. L’objectif est de susciter le dialogue. Nous les encourageons également à porter ces maillots dans leur vie de tous les jours.
Q : Pensez-vous que les Canadiens sont bien informés sur ce qui s’est passé dans les pensionnats? Faut-il poursuivre la sensibilisation?
Phyllis : Les adultes d’aujourd’hui ne savaient pas ce qui nous arrivait lorsqu’ils étaient à l’école. Quant aux survivants et à leurs familles, nous n’en parlions même pas à la maison.
Mais maintenant, il n’y a plus d’excuse pour que les Canadiens ne sachent pas ce qui nous est arrivé. Comme le dit Murray Sinclair (ancien président de la Commission de vérité et réconciliation du Canada), il ne s’agit pas seulement de l’histoire des autochtones, mais aussi de celle du Canada.
Je pense qu’il y aura toujours des gens qui l’ignorent, qui s’en moquent ou qui ne font pas l’effort de se renseigner.
Je ne suis pas la seule, avec la Journée du maillot orange, qui fait des efforts pour sensibiliser les Canadiens sur ce qui s’est passé. Dans chaque province, des survivants et des champions font leur part.
Mais ce n’est pas à nous de sensibiliser les Canadiens. Ils doivent aussi faire des efforts. Lire sur le sujet. Discuter avec les autres. Intervenir lorsqu’une personne croit tout savoir.
Jeremy : La vérité et la réconciliation ne concernent pas seulement le 30 septembre. C’est un sujet qui est toujours d’actualité. Toute l’année. La sensibilisation ne se fera pas en une seule journée, mais chaque jour.
Q : Quel message désirez-vous transmettre cette année, lors de la Journée du chandail orange et la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation?
Phyllis : Je fais partie du cercle des survivants du Centre national pour la vérité et la réconciliation. L’un des survivants du cercle rappelle toujours à tout le monde que la vérité passe avant la réconciliation. La vérité n’est pas encore totalement dévoilée.
Une partie de la vérité n’a pas encore été révélée. Mon histoire n’est pas unique. Plus de 150 000 enfants ont été arrachés à leur famille et envoyés dans les pensionnats. Ces personnes et leur famille ont également des histoires à raconter.
Jeremy : Ouvrez vos cœurs et vos esprits au passé et au présent.
Comme le disait ma mère, la vérité n’a pas encore été révélée. Nous continuons encore aujourd’hui d’apprendre la vérité. Il faut donc continuer à ouvrir vos cœurs et vos esprits.